Avant le 7 octobre 2023 : une fiche d’information de VJI

« Dans l’après-coup immédiat des événements du 7 octobre 2023, il est devenu tabou de mentionner tout ce qui s’était produit avant. Comme si l’histoire avait commencé ce jour-là. »
Jewish Voice for Labour (UK)


Une partie du récit que les partisans d’Israël mettent de l’avant consiste à prétendre que « tout a commencé » le 7 octobre 2023, lorsque le Hamas et d’autres militants de Gaza ont mené une violente incursion en Israël, entraînant la mort et la capture de centaines de personnes israéliennes et non-Palestiniennes. 

Pourtant, Israël brutalise la population palestinienne depuis bien avant le 7 octobre 2023, non seulement à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et à l’intérieur même des frontières israéliennes de 1948.

Posez-vous la question : pourriez-vous vivre sous ces conditions? Accepteriez-vous de vivre sous ces conditions?

À Gaza, avant le 7 octobre 2023

Gaza avant les bombardements israéliens. Aujourd’hui, plus de la moitié des bâtiments de Gaza ont été endommagés ou détruits.
Les opérations militaires israéliennes à Gaza, 2007 – 2023
  • Israël a occupé Gaza militairement en 1967 et y a établi des colonies juives, en violation du droit international. Bien qu’Israël ait retiré ses troupes et ses colonies en 2005, la bande de Gaza est demeurée un territoire occupé par Israël, toujours en contravention du droit international.
  • Cette minuscule enclave, un peu plus petite que la région de Winnipeg, abrite 2,2 millions d’habitants, dont la moitié a moins de 19 ans. C’est l’un des territoires les plus densément peuplés au monde. 
  • Israël a imposé un blocus maritime, aérien et terrestre à Gaza pendant seize ans, transformant le territoire palestinien en ce qui est largement reconnu comme une « prison à ciel ouvert ».
  • En 2011, le regretté historien juif Tony Judt a qualifié le traitement de Gaza par Israël de « régime punitif ne pouvant être comparé à rien d’autre dans le monde ».
  • Depuis 2007, mais avant le 7 octobre 2023, Israël a bombardé ou envahi Gaza à sept reprises, tuant près de 4 000 Palestiniens et Palestiniennes et détruisant des milliers de maisons ainsi que des écoles, universités, hôpitaux et d’autres infrastructures communautaires, souvent à répétition. Avant le 7 octobre 2023, Gaza a tenté de se reconstruire à plusieurs reprises, pour être détruite à nouveau.
  • Israël utilise depuis longtemps une force complètement disproportionnée pour cibler des militants présumés, entraînant des dommages collatéraux importants. Par exemple, lors d’une attaque menée en 2002 visant un seul combattant, une bombe d’une tonne a été larguée sur un complexe d’appartements à Gaza, tuant 14 civils, dont au moins dix enfants. Lorsqu’on lui a demandé ce qu’il pensait de ce massacre, le commandant de l’armée de l’air israélienne qui avait ordonné la frappe a déclaré au journal israélien Ha’aretz : « Je dors bien la nuit » et « Qu’est-ce que je ressens lorsque je largue une bombe? Un léger choc sur l’aile de l’avion sous l’effet du largage. »
Les attaques contre les terres, la nourriture et la vie
  • L’objectif de ces incursions israéliennes est en partie de détruire la capacité des Gazaouis à se nourrir et s’approvisionner. L’armée israélienne a délibérément ravagé de vastes étendues agricoles, incluant des terres de culture de qualité, du bétail et des infrastructures agricoles, tout en confisquant d’autres parcelles pour en faire des zones de sécurité interdites d’accès. Israël a également attaqué les infrastructures de Gaza, comme les systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement, et a perturbé la capacité de production d’électricité.
  • Israël a aussi restreint la capacité de pêcher des Gazaouis. Après leur avoir initialement accordé une zone de pêche de 20 milles nautiques, Israël a réduit cette limite à six milles nautiques en 2012, puis à trois milles en 2013. Et même là, les pêcheurs de Gaza sont régulièrement attaqués par des navires israéliens armés, ce qui rend la pêche pratiquement impossible.
  • Alors que Gaza est largement dépendante de l’aide alimentaire provenant de l’extérieur de ses frontières, et ce, depuis bien avant le 7 octobre 2023, Israël a délibérément restreint l’apport alimentaire. Pour citer Human Rights Watch :
    • « Les autorités militaires israéliennes… ont limité la “portion humanitaire quotidienne” de nourriture qu’elles estimaient nécessaire pour les habitants de Gaza, suivant apparemment une politique visant à “les mettre au régime”, comme l’a déclaré un haut responsable israélien en 2006. Israël… a interdit ou restreint l’importation de biens ne présentant aucune menace concevable pour la sécurité israélienne, y compris, parmi bien d’autres : le thé, la confiture, les lentilles et d’autres produits qu’Israël considérait comme des “articles de luxe”; le gaz de cuisson; ainsi que des équipements de radiothérapie et des médicaments utilisés dans les traitements contre le cancer. Israël a injustement retardé pendant des mois, voire des années, l’importation de pièces détachées nécessaires à la réparation du réseau électrique endommagé et vétuste de Gaza. »
La Grande marche du retour et la résistance palestinienne
  • En 2018 et 2019, les Gazaouis ont organisé la « Grande marche du retour », où des milliers de personnes non armées ont convergé à plusieurs reprises vers la frontière israélienne pour protester contre les conditions sous lesquelles elles étaient contraintes de vivre. À cette occasion, les soldats israéliens ont tué 223 personnes, dont 46 enfants, et en ont blessé 9 204 de plus, parmi lesquelles plus de 900 enfants, dont un grand nombre ont été touchés aux jambes par des tireurs d’élite israéliens. Parmi les blessés, le médecin canadien Tarek Loubani, qui agissait sur place en tant qu’urgentiste et était clairement identifiable à sa blouse, a été touché aux deux jambes. L’homme qui lui avait porté secours a plus tard été tué par des tirs israéliens.

Une étude réalisée par The Lancet en 2020 a montré que plus de 53 % des enfants de Gaza souffraient de troubles de stress post-traumatique (TSPT), et ce, avant même le conflit qui a commencé le 7 octobre 2023.

En Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est

L’oppression israélienne en Cisjordanie et à Jérusalem-Est
  • Israël a maintenu l’occupation de 1967, annexant même des parties de Jérusalem-Est et de la Cisjordanie, le tout en violation du droit international.
  • Les terres de la Cisjordanie accessibles à la population palestinienne ont été réduites à seulement 18 % de la superficie totale du territoire, découpées en petits cantons isolés séparés par des routes israéliennes, des colonies israéliennes et des points de contrôle, ce qui rend les déplacements entre les cantons extrêmement difficiles.
  • Une barrière de séparation, jugée illégale en 2004 par la Cour internationale de justice, sépare la Cisjordanie, ainsi que certaines parties de Jérusalem-Est, d’Israël, tout en découpant des portions de la Cisjordanie.
  • Même si, en vertu des Accords d’Oslo, la population palestinienne continue d’exercer un contrôle minimal sur certaines terres, les forces armées israéliennes ont régulièrement mené des incursions armées dans tous les territoires de la Cisjordanie, parfois en capturant, en agressant ou en tuant des Palestiniens.
  • De nombreux résidents de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est sont soumis à la procédure de détention administrative, c’est-à-dire qu’ils peuvent être détenus pendant de longues périodes dans des prisons israéliennes sans inculpation ni procès. Beaucoup de ces détenus sont des enfants. Tout cela est contraire au droit international.
  • Depuis le début de l’occupation, des colons juifs israéliens accaparent des terres palestiniennes pour s’y installer, toujours en violation du droit international et même, dans certains cas, du droit israélien (lequel n’est jamais appliqué).
  • En date du 7 octobre 2023, les colons juifs israéliens étaient environ 700 000.
  • Bon nombre de ces colons agissent comme une milice armée irrégulière et renégate, qui humilie, agresse et tue souvent des résidents palestiniens, et détruit des biens agricoles et personnels, bien souvent avec la connivence de l’armée et de la police israéliennes. Les tribunaux se montrent indulgents, voire permissifs, envers les auteurs de ces crimes, et généralement insensibles à l’égard des victimes. Un cas tristement célèbre de 2015 concerne des colons qui ont incendié au cocktail Molotov la maison d’une famille palestinienne dans le village de Douma, tuant trois personnes : un bébé de 18 mois brûlé vif, et ses deux parents, qui ont succombé à leurs blessures quelques semaines plus tard. Un autre enfant de quatre ans a quant à lui souffert de brûlures au second et au troisième degré sur plus de 60 % de son corps. Quelques mois plus tard, lors d’un mariage de colons, des convives ont symboliquement poignardé une photo de l’enfant décédé lors de cette attaque.
  • Les résidents palestiniens de Cisjordanie ne sont pas citoyens d’Israël et sont soumis à la loi militaire israélienne, tandis que les colons juifs sont citoyens israéliens et vivent sous la loi israélienne. 
  • Les résidents palestiniens de Jérusalem-Est paient des impôts à Israël, mais ne sont pas citoyens, n’ont pas le droit de vote et sont privés de services (comme l’assainissement, l’éducation et les soins de santé) dont jouissent les autres contribuables israéliens.
  • À mesure que leur nombre augmente, les habitants palestiniens de Cisjordanie et de Jérusalem-Est doivent obtenir des permis de construire auprès des autorités israéliennes. Les permis de construire sont souvent refusés ou retenus dans l’attente d’une collaboration des demandeurs avec les autorités israéliennes. La construction d’un bâtiment sans permis risque d’entraîner sa démolition, aux frais des constructeurs.

À l’intérieur des frontières israéliennes de 1948 : discrimination et ségrégation

  • Entre 1947 et 1949, Israël a procédé à un nettoyage ethnique de plus de 700 000 Palestiniens et Palestiniennes, les expulsant de leurs terres. Ces exilés et leurs descendants n’ont jamais été autorisés à revenir, malgré le droit international et les résolutions des Nations Unies qui stipulent le droit au retour.
  • Israël a placé les Palestiniens et Palestiniennes restés à l’intérieur des frontières israéliennes sous loi martiale pendant 18 ans, jusqu’en 1966, date à laquelle ils ont finalement été considérés comme des citoyens. Même si les Palestiniens ont la possibilité de voter pour des partis qui défendent leurs intérêts, ceux-ci n’ont presque jamais été inclus dans les coalitions politiques investies du pouvoir gouvernemental. Au fur et à mesure que le courant politique dominant se déplace vers la droite en Israël, la formation de telles coalitions devient de plus en plus improbable.
  • En 2018, la nouvelle Loi Israël, État-nation du peuple juif a fait de la colonisation juive une valeur nationale. En pratique, cela permet d’éliminer légalement les derniers vestiges des revendications palestiniennes relatives à leurs droits.
  • Les citoyens palestiniens sont perçus avec méfiance par de nombreux Israéliens, qui les considèrent comme une cinquième colonne, une menace pour les Israéliens juifs.
  • Vingt pour cent des citoyens israéliens sont des Arabes palestiniens. Ils vivent sous le coup de 65 lois israéliennes qui les discriminent en raison de leur origine ethnique. Ils sont traités comme des citoyens de seconde ou de troisième classe dans leur propre pays, privés de services comparables à ceux dont jouissent leurs compatriotes juifs, et subissent des discriminations en matière d’éducation, de logement, de soins de santé, de santé publique et de services municipaux. Leurs taux d’incarcération et de chômage sont bien plus élevés que la norme israélienne.
  • De nombreuses organisations de défense des droits de la personne (dont B’Tselem, Human Rights Watch et Amnesty International) emploient le terme « apartheid » pour qualifier le régime politique israélien et incluent dans ce terme le traitement réservé aux Palestiniens à l’intérieur des frontières israéliennes de 1948.
  • Les citoyens palestiniens d’Israël sont traités de manière extrêmement sévère lorsqu’ils protestent contre leur situation ou expriment leur solidarité avec leurs proches à Gaza, à Jérusalem-Est ou en Cisjordanie. En 1976, les forces israéliennes ont tué six Palestiniens non armés et en ont blessé plus de 100 lors de manifestations.