Mise à jour de la campagne : plus d’avantages fiscaux pour l’apartheid !

Le statut d’organisme de bienfaisance du Fonds National Juif du Canada (FNJC) a officiellement été révoqué. Le 10 août, l’avis d’intention de révocation concernant le FNJC a été publié dans le journal officiel du gouvernement fédéral, la Gazette du Canada. Le gouvernement officialise ainsi cette décision historique, et l’argent des contribuables canadiens ne servira plus dorénavant à subventionner le soutien illégal du FNJC à l’apartheid israélien. 

Au lendemain de cette importante victoire, nous avons une pensée pour les Palestiniens et les Palestiniennes ainsi que pour l’ensemble des membres et allié·es de VJI qui ont travaillé sans relâche pour en arriver là. Cette décision est le résultat direct des campagnes populaires menées au cours des dernières décennies, comme la campagne « Stop the JNF » de VJI, et des démarches individuelles comme celles d’Ismail Zayid, Uri Davis et Walter Lehn.

Au moment où l’ancien organisme de bienfaisance fait appel de cette décision, il est important de retracer la longue histoire du FNJC en matière de non-respect de la législation fiscale canadienne et de rappeler son refus obstiné de se conformer à la réglementation gouvernementale.

Qu’est-ce que le Fonds National Juif?

Ce soi-disant « organisme environnemental sans but lucratif » est étroitement lié aux activités colonisatrices et génocidaires d’Israël depuis avant même la fondation du pays. Le FNJ est aujourd’hui le plus important propriétaire foncier en Israël. Largement connu pour sa campagne désormais centenaire visant à « faire fleurir le désert », le FNJ a en réalité acquis ses terres par le biais de pratiques reposant sur l’exploitation et l’expulsion forcée, souvent violente, des populations palestiniennes de leurs terres. Le FNJC a contribué à ces efforts depuis sa fondation en finançant des projets comme le Parc Canada, qui est érigé sur le site de plus de 1 400 résidences palestiniennes démolies en Cisjordanie.

Le soutien continu du FNJC à Tsahal et aux colonies de peuplement

En 2018, le FNJC a annoncé qu’il avait cessé de soutenir des activités sur les bases militaires israéliennes en 2016 et qu’il s’engageait à ne plus le faire à l’avenir. Trois ans plus tard, le Fonds déclarait qu’il avait cessé de financer tout projet dans les « territoires contestés ». Or, Voix juives indépendantes a trouvé des preuves raisonnables qui portent à croire que les représentant·es du FNJC ne disent pas toute la vérité.

Les documents en appui à la révocation récemment publiés montrent que l’ARC a donné suite à de nombreux arguments développés dans la plainte de 85 pages déposées en 2017 dans le cadre de notre campagne #StopJNFCanada, concernant notamment : 

  • le soutien à l’armée israélienne;
  • la complicité dans l’annexion de facto de la Cisjordanie occupée et dans l’annexion de Jérusalem-Est et du plateau du Golan;
  • le rôle d’intermédiaire pour le compte du FNJ (KKL) en Israël.

Comme l’a révélé le site Canadian Jewish News, le FNJC a versé 1,9 million de dollars à la Ne’eman Foundation entre 2018 et 2022, laquelle a perdu son statut d’organisme de bienfaisance au même moment, en grande partie parce qu’elle finançait des groupes connus pour leur soutien à l’armée israélienne et à des groupes de colons de droite, dont Elad/Ir David et Women in Green. Mais l’histoire ne s’arrête pas là.

Des activités illégales et un soutien continu à l’armée israélienne

Au cours des dernières années, Voix juives indépendantes a recensé de nombreuses activités du FNJC qui soutiennent l’armée israélienne et l’occupation de la Cisjordanie. En voici une sélection : 

  1. Des projets implantés sur des bases militaires

Le FNJC a continué de soutenir la base navale de Bat Galim, près de Kiryat Eliezar/Haïfa, en y finançant une promenade entre le 1er janvier 2008 et le 10 juillet 2022.
Il a aussi continué à soutenir la base aérienne de Tel Nof en finançant un « coin rafraîchissement pour les soldats de l’escadron 114 Y’saor ». Ce projet a été entamé le 5 mai 2015 et achevé le 23 avril 2023.

  1. Installations de formation pour préparer les jeunes à devenirs soldats de Tsahal

Le FNJC a commencé à recueillir des fonds et à faire la promotion d’une « Maison pour l’excellence » à Sdérot, en Israël, et finalement recueilli au moins deux millions de dollars pour la « Bervin JNF Canada House ». L’objectif de ces centres, selon KKL-JNF, est « d’encourager les jeunes et la communauté à s’identifier aux valeurs sionistes, à servir de manière significative dans Tsahal… » Selon KKL-JNF, l’une des réussites des Heritage Centers, qui s’adressent aux jeunes du dernier cycle du secondaire, est que ceux-ci se disent « plus disposés à être recrutés en vue d’un service militaire significatif… » Les formations des « maisons pour l’excellence » sont offertes par des soldats de Tsahal, en particulier des soldats ayant servi dans l’unité d’élite 8200 des services de renseignements.

  1. Des missions en Israël

Le FNJC a continué à coorganiser, avec d’autres sections du FNJ, des missions à Israël, qui comportaient notamment des activités de bénévolat dans les bases militaires et des dégustations de vins dans les colonies.

Lors d’une mission en janvier 2024, les participant·es ont fait du bénévolat dans un entrepôt militaire, préparant 16 000 sacs de barres énergétiques pour les soldats déployés à Gaza, afin de « contribuer […] à l’effort de guerre ». Lors d’une mission en février dernier, le PDG du FNJC, Lance Davis, a publié une photo de lui sur Facebook en train de participer à la préparation de 400 repas destinés aux soldats de Tsahal. Lors d’une mission en mai 2024, l’itinéraire comportait une visite dans une base d’artillerie située près du kibboutz Nir Oz, adjacent à la bande de Gaza, pour « rencontrer des soldats de Tsahal », une dégustation de vin à Gush Etzion, une colonie illégale en Cisjordanie, le 21 mai 2024, et un souper en compagnie de « soldats esseulés ».

  1. Le Begin Park

En plus de recueillir des fonds utiles à Tsahal, le FNJC a continué de soutenir l’occupation illégale d’Israël en Cisjordanie en finançant le Begin Park, qui empiète dans la Cisjordanie occupée tout près du village palestinien de Battir, lequel était également un site du patrimoine mondial de l’UNESCO jusqu’en juin 2022. Comme cela a souvent été le cas, les forêts du JNF contribuent à produire des « faits sur le terrain » qui permettent à Israël d’étendre plus aisément ses colonies. Fidèles à ses objectifs, le gouvernement israélien a annoncé qu’il approuvait l’implantation d’une nouvelle colonie sur les terres de Battir le 15 août 2024. 

  1. Le « Portail de Jérusalem »

Selon son site Internet, le FNJC sollicite activement des dons destinés à la construction d’un parc d’attractions de 1 300 mètres carrés, déjà partiellement en fonction, dans le secteur illégalement annexé de Jérusalem-Est. Lié au parc national de la Cité de David, ce projet est dirigé par le groupe de colons de droite Elad/Ir David, qui s’efforce d’expulser la population palestinienne et de créer « une majorité juive dans les quartiers arabes » de Jérusalem-Est. Le travail de cette organisation a notamment été décrit par l’ARC comme étant non caritatif dans son récent avis de révocation du statut d’organisme de bienfaisance d’une autre organisation, la Ne’eman Foundation.

Plus jamais d’allègements fiscaux pour l’apartheid et les crimes de guerre

Le FNJC ne doit plus jamais être autorisé à retrouver son statut d’organisme de bienfaisance. Il a démontré, au cours de plusieurs décennies, son refus de travailler honnêtement avec les fonctionnaires de l’ARC, les donateurs et le public canadien, en violant de manière répétée les règles de l’ARC et en impliquant l’ensemble des Canadien·nes dans des violations du droit international.

Malheureusement, le FNJC n’est pas le seul organisme à profiter des avantages fiscaux du Canada pour financer l’apartheid et les crimes de guerre israéliens. En avril 2024, VJI Canada et le Mouvement pour une Paix Juste ont publié une lettre ouverte demandant au gouvernement fédéral d’enquêter sans délai et de révoquer le statut d’organisations comme Mizrachi Canada, qui utilise des fonds fédéraux pour soutenir des unités de l’armée israélienne et des organisations de colons violents en Israël.

Il a fallu des dizaines d’années d’organisation, de pétitions et de manifestations pour que le gouvernement du Canada prenne enfin des mesures contre les activités illégales du FNJC. Au moment où la population palestinienne subit un génocide à Gaza ainsi que des attaques de colons et des raids militaires en Cisjordanie, il est essentiel de mettre fin immédiatement à l’utilisation du statut d’organisme de bienfaisance au Canada pour soutenir l’apartheid et les crimes de guerre d’Israël, et de faire en sorte que les organisations qui les financent soient enfin tenues responsables de leurs actes.